Grande cause du quinquennat Macron, les mesures prises ces dernières années en faveur de l’égalité hommes-femmes se sont majoritairement focalisées sur les femmes et pour cause ! Cependant, s’il est capital d’augmenter le nombre de femmes aux Comex et de valoriser leur place dans le monde du travail, la balance de l’égalité repose aussi sur la participation des hommes. La parité en entreprise implique une prise de conscience collective. Comment est-ce que les employeurs peuvent soutenir les hommes qui souhaitent aider les femmes ?

Changer le paradigme de l’homme au travail

On évoque souvent la charge mentale portée par les femmes, qui reste bien entendu non négligeable. Mais quid de la charge mentale chez les hommes ? Enfermés dans un rôle archaïque responsable du revenu pour le foyer, la perception d’un homme qui reste à la maison reste encore très négative et préjudiciable pour sa carrière. On entend encore trop souvent de railleries quand un homme rentre rejoindre sa famille au lieu de passer à l’afterwork.


Est-ce une question de culture d’entreprise ou de comportement individuel ? Les deux.  Un dirigeant qui montre l’exemple en prenant un congé parental totalement assumé fait réfléchir ses employés. Une happiness manager qui refuse d’organiser des afterworks le soir pour permettre aux pères salariés de s’y joindre initie une attention collective. Un chef d’équipe qui ne répond plus aux sollicitations après les horaires de bureaux montre à ses pairs que rien ne sert d’envoyer des missives tardives, et donc de travailler tard, car ils n’obtiendront une réponse qu’au matin.

Revaloriser le congé paternité

Depuis le 1er juillet 2021, les hommes salariés bénéficient de 28 jours de congé paternité (35 jours dans le cas de naissance multiple). Une mesure qui va se généraliser, dans le cadre du projet de loi du financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2022, les professions libérales pourraient bénéficier du congé paternité. 

Ce grand pas dans le bon sens encourage les hommes à privilégier leur famille, mais aussi à soulager leur conjointe d’une partie de la charge apportée par un nouvel enfant. En revanche, le congé paternité acté sur papier ne fait pas encore l’unanimité. Il suffit de s’intéresser au cas médiatisé du joueur de Timoci Nagusa, joueur de rugby professionnel, critiqué pour avoir pris l’intégralité de son congé paternité. “J’ai pris cette décision sans hésitation, sachant que le boulot, le rugby, les fans, disparaîtront, mais seule la famille restera pour toujours,” a-t-il expliqué sur Twitter avant d’ajouter : “Si j’avais un petit mot à dire pour vous convaincre, ce serait de le faire pour vous, mais le plus important ici, est de le faire pour aider votre partenaire.” Ses détracteurs lui reprochent de porter atteinte à la performance de son équipe par son absence prolongée en pleine saison compétitive, un reproche qui se traduit facilement dans d’autres cas de figure professionnels. D’une part, il doit être acceptable pour les hommes de prendre du temps pour leur famille, que ce soit pour soulager la mère ou s’occuper de leurs enfants. D’autre part, un salarié ne devrait pas avoir à se justifier de la prise d’un congé auquel il a droit. C’est également le cas de la prise d’un congé pour un enfant malade, encore trop d’hommes entendent encore que c’est le rôle de la mère de s’absenter du travail en cas d’urgence familiale et non du père.

Le congé parental reste victime d’idées reçues

Similairement, le congé parental a été mis en place pour permettre aux deux parents d’alterner leur présence auprès des enfants ; or, il reste perçu comme un droit surtout à destination des salariées. Selon Hélène Périvier et Grégory Verdugo auteurs d’une étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) sur le sujet, seulement 1% des pères salariés demandent un congé parental. Augmenter son indemnisation (aujourd’hui de 399 euros par mois pour un congé à temps plein) et mener des campagnes d’information sur le dispositif pourraient contribuer à convaincre plus d’hommes à y avoir recours, suggèrent les auteurs de l’étude.  

Certaines entreprises évoluant dans un secteur compétitif vont jusqu’à mettre en avant ce dispositif. C’est le cas de Volvo Cars qui depuis le 1er avril de cette année offre 6 mois de congé parental, rémunérés à 80% du salaire. Le dispositif reste flexible et les salariés peuvent prendre ce congé selon leurs préférences au cours des trois années qui suivent la naissance de l’enfant. La condition ? Un an d’ancienneté dans l’entreprise. Voici un moyen d’allier parité et QVT attrayante pour les organisations qui recrutent dans un secteur pénurique.

S’engager à servir la parentalité en entreprise

La Charte Parentalité en Entreprise existe depuis 2008 et engage plus de 700 entreprises signataires. La bonne gestion de la parentalité en entreprise revient à permettre aux salariés, hommes et femmes de se rendre disponible pour leur famille, tout en limitant les effets néfastes pour leur carrière

Pour ce faire, il est question de :

  • faciliter la prise des congés à disposition des parents salariés, 
  • éviter les réunions trop matinales ou tardives, 
  • prévoir des aménagements d’horaires pour aider les salariés à gérer les problèmes familiaux,
  • sensibiliser les managers aux besoins et préoccupations des parents salariés,  
  • maintenir un politique de télétravail flexible, 
  • rendre ces aménagements accessibles de façon égalitaire aux hommes et aux femmes.

La parité part d’un engagement profond qui doit se traduire au quotidien

La vie professionnelle actuelle peut être qualifiée d’épouvante, de chaotique et d’imprévisible. De plus, l’équation longue heures de travail équivaut à réussite professionnelle reste d’actualité. Le lien entre la parité et les hommes repose largement sur la capacité de ces derniers à clarifier leurs priorités, à établir et à maintenir des limites.

 

Un cycle de réflexion pour soutenir la parité en entreprise

Toute personne qui a essayé de maintenir un équilibre entre vie professionnelle et privée parfait témoignera du fait qu’il s’agit d’un travail d’une vie. En effet, les actions pour soutenir l’égalité hommes-femmes en entreprises méritent une attention récurrente. Dans un article passionnant par les chercheuses Iona Lupa et Mayra Ruiz-Castro pour la Harvard Business Review, les autrices décrivent l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle comme un processus cyclique auquel peuvent prendre part l’employé et l’employeur. Ce déroulé comprendre cinq capacités à développer chez le salarié : 

  • Le recul : la capacité à poser un regard objectif sur son quotidien de travail permet d’identifier les sources de stress et d’insatisfaction. 
  • L’intelligence émotionnelle : ce soft skill recherché implique de savoir écouter ses émotions pour mieux comprendre l’effet d’une situation, par exemple d’un cadre de travail éprouvant, sur sa santé mentale. Identifier les émotions que l’on éprouve, qu’elles soient positives ou négatives, nous permet de mieux identifier nos besoins et les choses qui nous sont importantes, puis de les rationaliser. 
  • Le sens des priorités : si tout n’est pas toujours rose, il est important d’allouer du temps et de l’énergie pour les activités et projets qui nous motivent. Cette capacité, intimement liée à notre gestion du temps, impacte fortement sur la qualité de notre quotidien, au travail et dans la vie personnelle.
  • Le sens critique : grâce à lui, il est plus facile d’évaluer la faisabilité des changements souhaités pour rééquilibrer sa vie professionnelle et personnelle. 
  • La communication de ses besoins : une fois les changements actés et validés, le salarié peut choisir d’échanger avec son N+1 et ses pairs. Par exemple, s’il décide de ne plus répondre à des sollicitations passé 17h tous les mardi et jeudi, alors cela peut faire l’objet d’un mail ou d’une notification automatique ces jours-là. Une communication claire autour de ses limites fait partie intégrante des bonnes pratiques contribuant à l’équilibre vie professionnelle et personnelle.  

 

L’équilibre se trouve peut-être dans la redéfinition du “professionnalisme » et les limites à établir pour protéger son temps, qu’il soit consacré à la vie de famille, aux autres projets qui nous passionnent ou à soutenir la carrière des femmes de son entourage.