L’intuition, se caractérise par une “petite voix” ou un bon ou mauvais feeling, elle est humaine et touche tout le monde. Pourtant il est important de ne pas se laisser aveugler par ces sentiments inexplicables lors d’un recrutement, même si parfois ils sont confirmés ! Nous allons dans cet article décrypter pourquoi il est important de rester factuel lors d’un entretien d’embauche et reléguer son intuition au second plan.
Que dit la science sur l’intuition en recrutement
La science définit l’intuition comme étant un mécanisme physiologique, automatique et inconscient. En réalité, il s’agit de l’aptitude du cerveau à reconnaître des expériences similaires que nous avons vécues par le passé. En recrutement, l’intuition tend à prendre le dessus lors d’un entretien au format non structuré. Encore très souvent utilisé, car considéré comme agréable, il repose sur ce qu’on appelle le “jugement professionnel non structuré”. Or, ce jugement se base uniquement sur des données non factuelles, tirées de l’expérience du recruteur comporte de nombreux biais cognitifs. Voici comment l’intuition en recrutement seule peut induire en erreur.
Les biais cognitifs influencent l’objectivité
Dans son ouvrage, “La formation de l’esprit scientifique : contribution à une psychanalyse de la connaissance”, le psychanalyste Gaston Bachelard définit l’objectivité comme étant “la qualité de ce qui est conforme à la réalité, d’un jugement qui décrit les faits avec exactitude”. Or, selon l’expert en psychologie cognitive Daniel Kahneman, les biais cognitifs empêcheraient une personne d’avoir un raisonnement neutre puisqu’ils apportent une distorsion de la réalité. Les biais fonctionnent comme un court-circuit mental qui va traiter de manière immédiate une information interne (basée sur la mémoire) ou externe (basée sur l’environnement). Cet automatisme inconscient va permettre à une personne d’analyser rapidement une situation en se basant sur ses croyances et ses expériences passées. Par ce fonctionnement, la personne s’expose à des erreurs de raisonnement, de perception, de jugement, ou autre, qui vont amener à prendre des décisions erronées.
Faut-il complètement se défaire de l’intuition en recrutement ?
Même si l’intuition est un concept qui séduit toujours un bon nombre de décisionnaires RH, l’embauche au feeling n’est pas un gage de fiabilité et n’offre pas de garantie. Même les recruteurs les plus expérimentés pensent pouvoir user de leur intuition grâce à leurs années d’expérience. La vérité reste que tout le monde est touché par les biais cognitifs, et d’autant plus lorsque l’on accumule des années de métier. L’intuition en recrutement n’offre pas une indication à 100% fiable dans l’évaluation de candidats. Le seul moyen de s’assurer que notre jugement est totalement libre de biais cognitifs est de réunir deux critères essentiels… et ce n’est pas gagné.
L’intuition ne peut prédire l’avenir
Il est possible de développer une intuition fiable à condition qu’un recruteur puisse opérer dans un environnement qui reste inchangé. Personne, ni même un recruteur expérimenté, ne peut prédire l’avenir et les facteurs qui pourraient impacter la performance de l’entreprise ou celle de la vie privée d’un salarié. Car l’entretien, tel un sas dans le temps et l’espace, ne permet pas d’anticiper les éventuelles modifications structurelles ou organisationnelles qui pourraient impacter les collaborateurs. En d’autres mots, on ne peut garantir que les circonstances de vie du candidat, l’environnement de travail et le détail de la mission exposés lors de l’entretien restent inchangés.
L’intuition requiert un feedback immédiat
Lorsque le recrutement est terminé, plusieurs semaines et mois sont nécessaires pour déterminer si la nouvelle recrue est performante et épanouie. Or, pour s’assurer que l’intuition était bonne, il faudrait pouvoir donner un feedback presque immédiatement à la prise de poste. Si les délais entre l’embauche et l’intégration du nouveau candidat peuvent varier, le recruteur ne peut pas prévoir comment va se dérouler son arrivée dans l’entreprise. Un feedback rapide serait alors peu objectif et équivoque. De plus, le recruteur n’a pas forcément accès à cette remontée d’informations. Dans certains cas, il peut s’agir d’une grosse erreur de recrutement dont l’employeur se rendra compte que bien plus tard.
Utiliser l’intuition pour garder un rapport humain
Comme mentionné plus haut, nos biais cognitifs et nos croyances sont trop ancrés pour offrir un jugement totalement neutre. Si la sélection d’un candidat au feeling est déconseillée, il ne faut pas non plus oublier que nous sommes des êtres humains dotés de convictions et de valeurs qui nous définissent. Pourquoi ne pas envisager d’utiliser ce feeling comme un critère d’observation des candidats et non de jugement ? En tant que garant du recrutement de l’entreprise, le recruteur peut utiliser son intuition pour déterminer si ledit candidat correspond à la culture d’entreprise, par exemple.
Les tests psychométriques : la science des compétences d’avenir
Les deux critères nécessaires à la bonne utilisation de l’intuition en recrutement sont difficilement réunissables. Les recruteurs peuvent alors se doter d’une solution plus scientifique pour s’assurer d’un recrutement uniforme et neutre.
Les softs skills ça vous parle ? Désormais incontournables dans la plupart des processus de recrutement, ce sont les compétences d’avenir sur lesquelles il faut miser dès aujourd’hui. Le test psychométrique, tiré des sciences comportementales, aide le recruteur à saisir les traits de caractère, les préférences de mode de travail ou encore le genre d’affinité relationnelle d’un candidat. Cette technique de recrutement plus scientifique permet de déceler des qualités non revendiquées sur un CV ou une page Linkedin. Laissant de côté les compétences techniques, on va davantage déceler le potentiel d’une personne au travers des capacités cognitives, de la personnalité, des aptitudes comportementales et de ses motivations. Grâce à l’algorithme impassible, les biais cognitifs du recruteur ne viendront pas interférer avec les résultats.
L’IA pour valider un feeling par la science
On ne peut, presque, plus se tromper. En ayant recours à l’IA dans le recrutement, les RH peuvent désormais s’armer de données qui vont leur permettre d’anticiper des comportements futurs en fonction de l’évolution de l’entreprise et du salarié. Il ne s’agit pas de déshumaniser le rôle du recruteur, mais de lui apporter une solution scientifique qui va fiabiliser ses décisions et optimiser ses efforts de recrutement. Si le feeling a été bon lors d’un premier entretien physique, l’algorithme impassible de l’IA va permettre au RH ou au manager de prendre une décision confirmée par le test psychométrique, et d’éloigner le risque d’être victime de ses propres biais cognitifs.
Mieux vaut prévenir que guérir, ce dicton s’applique allègrement à la sphère RH. 77% des RH sondés par une étude My RH Line se disent “très fatigués” et les challenges auxquels les employeurs doivent faire face ne manquent pas. Autant mettre toutes les chances de son côté pour recruter avec efficacité. L’intuition ne suffit pas pour se munir d’un capital humain capable d’affronter l’avenir. C’est vers l’anticipation et la science que devront se tourner les décideurs RH pour pouvoir prendre des décisions pérennes et s’entourer de professionnels capables d’accompagner l’entreprise dans son évolution.